jeudi 30 août 2018

La Française (ego trip)


J’ai revu la Française hier, au Relais pour la vie. Nous avons à peine échangé quelques mots.
Je l’ai aperçue avant le concert. Elle nous a regardé et il me semble que j’ai chanté plus intensément, plus juste. Je crois qu’elle a apprécié le concert. Elle est venue me parler. J’étais en train de démonter la scène et je lui ai dit que nous nous parlerions après. Elle est revenue après. Nous avons échangé quelques mots, mais à vrai dire, Katia était tout près et je me sentais gêné. Je lui ai touché le bras et je suis allé saluer Marc qui se trouvait là. Pourquoi lui ai-je touché le bras? Je ne sais pas. Un signe amical, spontané. Comme toujours, je sentais un plaisir à lui parler mais aussi une certaine gêne, bien qu’elle soit toujours amicale et simple. Je l’ai aperçue plus tard. Je ne suis pas retourné la voir. Que dire en fait? Pourtant, à chacune de nos rencontres furtives, il semble que le courant passe. Elle a cette simplicité que je ne retrouve pas chez les autres femmes que je côtoie et sait aussi instaurer un certain trouble entre nous, sans draguer franchement. Je sais que je plais aux femmes et pourtant les autres me font sentir ma situation sociale plus que toute autre chose. Pas elle. Elle a cette façon de me faire exister en me regardant.
N’est-ce qu’une grano parmi tant d’autres? Est-ce qu’elle se donne un style artiste? Non. Elle est trop fière pour se donner des styles. Quand je suis allé chercher Paul l’autre jour, je l’ai entendue derrière la porte chanter à son bébé. Une voix douce, fredonnée, qui me caressait les oreilles.
Qui est-elle pour être avoir quitté son pays et être venue vivre ici, dans ce petit appartement minable? Pourquoi avoir refait un enfant et s’être séparée? Il faut dire qu’il a pas l’air facile, ce type… Mais qu’est-ce que j’en sais et qu’est-ce que ça peut me faire? Je voudrais la prendre dans mes bras. Non, c’est plutôt moi qui aurait besoin qu’elle me prenne dans ses bras.
Mais qu’est-ce que je raconte là et pourquoi j’écris tout ça? Ce cahier c’est la thérapeute conjugale qui m’a conseillé de le tenir, c’était pas pour parler d’elle. Est-ce qu’elle écrit? Sûrement.
Alors quoi? Que vas-tu faire la prochaine fois que tu la verras? Fuir encore? C’est pourtant pas Katia qui te dira quoi que ce soit, tout est toujours si correct entre vous.


***

Bonjour Katia,
Je suis la maman de Mathieu. On se connaît de vue, même si c’est toujours G. qui vient porter Paul ou que je vois quand j’amène Mathieu.
J’ai bien sympathisé avec G.
Je sais que l’amitié homme-femme est plus courante au Québec qu’en France, et pourtant ici comme là-bas, nous ne sommes pas à l’abri des qu’en dira-t-on.
J’ai beaucoup de plaisir à discuter avec G. Je ne peux vous garantir que cela n’aboutisse pas à une relation amoureuse. Mais pour l’heure, j’ai juste envie de le connaître davantage, d’entretenir une relation d’amitié normale.
Je ne viens pas vous demander quelque permission que ce soit, je crois d’ailleurs qu’un conjoint n’est pas un chien en laisse à qui on desserre la bride de temps en temps.
Mais l’idée de trahison, de vexation, de blesser qui que ce soit me répugne et c’est pourquoi je prends le temps de vous écrire.
En espérant que vous comprendrez,
E.

***

J’ai reçu hier une lettre de la mère de Mathieu. Nous nous sommes vues quelques fois bien que n’ayant jamais échangé. Quand G. la salue, je vois qu’il existe entre eux une complicité naissante.
Sa lettre est certes surprenante et pourtant il me semble qu’elle m’enlève un poids. Avec quelle simplicité elle énonce cela, alors que des années de thérapie conjugale ne nous plongeaient que davantage dans la confusion.
Oui, je crois que je suis capable de laisser jalousie et possessivité pour faire place à une nouvelle personne dans notre vie.


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